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Projet CanOvis

Premiers résultats et perspectives du projet CanOvis


Grace au matériel d’imagerie thermique, les affuts nocturnes permettent d’obtenir des informations sur l’activité des CPT, du troupeau (particulièrement en couchade libre) et sur les relations de ce système avec son environnement (faune sauvage, prédateurs, évolution météo, dérangements divers …)

Les données acquises par GPS permettent d’avoir des informations précises sur les déplacements des CPT équipés (tracés, durées, vitesses, dénivelés, chronologie…) et de corréler l’activité des chiens à celle des troupeaux en configuration ordinaire, mais aussi en interaction avec les loups (en association aux observations nocturnes et aux prédations survenues durant les suivis).

Suivi nocturne 2013-2015

161 nuits d’observation

114 séquences impliquant des loups
Interactions avec le système pastoral, relations intra-spécifiques, chasse, déplacements…

49 interactions des CPT avec la faune sauvage
évoluant autour des troupeaux (Chamois, sangliers, lièvres…)



Ces suivis de terrain nous fournissent des informations sur la réalité des relations loup-troupeau-CPT, sur le comportement des CPT au travail, sur les habitudes et réponses comportementales des loups aux abords des troupeaux protégés. Dans des contextes variés et complémentaires, nous documentons, en accédant au monde de la nuit, un panel de situations particulièrement intéressantes, voire insolites en l’état actuel des connaissances sur le sujet.

L’analyse préliminaire des ces données nouvelles et les échanges avec tous nos partenaires, nous permettent de remettre en cause quelques-unes des certitudes sur le fonctionnement du triptyque loup-troupeau-CPT et progressivement de porter un nouveau regard sur la vulnérabilité et la protection des troupeaux ainsi que sur le comportement (déprédateur ou non) des loups.

Une des forces de ce projet est de pouvoir juxtaposer différents types de données à l’échelle d’une unité pastorale . L’UP (et son sous-ensemble « le quartier de pâturage ») étant l’étalon qui semble le plus pertinent pour appréhender les différents facteurs déterminants de vulnérabilité et jouer sur l’efficacité des systèmes de protection mis en place.

En s’appuyant sur les travaux et méthodes déjà développés en France (diagnostics de vulnérabilité, recherche de facteurs déterminants de vulnérabilité, suivi du loup…) et en croisant les données historiques, les données nouvellement acquises et les expertises des éleveurs et bergers, la vulnérabilité et la protection d’un troupeau seront raisonnées autour de périodes et évènements clés liés au rythme du troupeau et à l’activité des CPT. Le tout corrélé à la biologie du loup (dispersion, reproduction, éducation des jeunes, comportements déprédateurs…).

En les appliquant à ce principe de base on pourra, par périodes, évaluer l’importance des différents facteurs de vulnérabilité, apporter des ajustements en terme de protection et mesurer l’impact des modifications proposées dans le fonctionnement du système pastoral étudié.

Ce que le terrain nous raconte:

  • Sur les UP suivis,les loups sont omniprésents (85% des nuits d’affut en 2015). Ils parcourent et prospectent l’espace pastoral régulièrement et parfois méthodiquement. Ils semblent autant intéressés par les opportunités de prédation que par les possibilités de charogner des carcasses associées à la vie des troupeaux. Dans les deux cas, un même individu peut faire preuve d’extrême audace comme de grande prudence, quelque soit le système de protection en place.
  • Sur les troupeaux observés, l’approche ou la très grande proximité de loups n’engendrent généralement pas d’affolement. En cas de perturbation, le retour au calme est relativement rapide.
  • Les CPT peuvent interrompre le comportement de prédation des loups, mais ils ne suffisent pas pour dissuader les loups de revenir sur les troupeaux protégés. Les CPT sont plutôt tolérants à la faune sauvage environnante, y compris au loup ! L’agitation ou le calme des CPT ne sont pas corrélés à la présence ou non de loups dans leur espace de travail. Ils sont en revanche sensibles aux sons caractéristiques que produisent les sonnailles en cas de mouvements anormaux du troupeau (de jour comme de nuit) et qui traduisent un dérangement. Les CPT sont donc loin de repérer tous les passages de loups « sans perturbation » du troupeau. Face à un dérangement, la réaction d’un CPT dépend de son caractère individuel autant que du fonctionnement du groupe de chiens (cohésion, solidarité, « émulation »). Pour une même perturbation, la réponse des CPT peut être très variable.
  • La vulnérabilité d’un système reste difficile à évaluer et anticiper. Sur un cycle de 24h (période sur laquelle se base notre modèle de vulnérabilité, en cours de développement) certaines périodes et situations sont pressenties comme plus vulnérables (pâturage nocturne, couchade libre, milieux fermés, chaleurs des chiennes qui « perturbent » les CPT …) Or, les observations réalisées invitent à plus de nuance, la vulnérabilité effective (mesurée in fine par un taux de dommages) est souvent en deçà de la vulnérabilité théorique et présupposée . Au fil des observations, notre regard sur les modèles en vigueur de vulnérabilité et d’efficacité des CPT évolue, jusqu’à se demander parfois, dubitatifs, « pourquoi les loups présents n’attaquent pas plus ? » !
  • Retours d’expérience : Bergers et éleveurs s’adaptent au jour le jour : « couchade libre ou pas ? », avec une bonne appréciation du risque certains bergers reprennent ponctuellement la couchade libre. D’autres, soumis à une pression diurne (report de prédation de jour) l’abandonnent pour soulager les CPT déjà très sollicités en journée.